Hravka Folman
« Haïr un enfant Juif, C’est haïr un enfant Arabe »
Hravka vit en Israël, elle a combattu dans le ghetto de Varsovie. Le tableau est construit en trois parties. en haut se trouve l’Aigle allemande de la Wehrmacht. sur le ceinturon des soldats figuraient la phrase «GOTT MIT UNS» ( Dieu avec nous ). Dans l’iconographie nazie, cette Aigle tenait entre ses serres la « svastika ». Dans ce tableau, les serres pénètrent dans le crâne des enfants. Au bas du tableau se trouve la phrase « Haïr un enfant arabe, c’est haïr un enfant juif ». Ces enfants sont deux jeunes filles identiques mais dont la robe est emblématiquement de la couleur symbolique de leur appartenance : verte pour l’enfant arabe, puisque le vert est la couleur de l’Islam, bleue pour l’enfant juif, puisque le bleu est la couleur de l’étoile de David dans le drapeau d’Israël. Après le choc de la vision de cette Aigle et de ces enfants dont les sangs mélangés sont répandus sur le sol ( le sang est le même pour toutes les races ), l’aspect violent de la présence de cet oiseau apportant le malheur par la projection sombre sur le monde sortant de ses ailes, fait résonnance avec toutes les guerres, toutes les intolérances, tous les souffrances issues de l’injustice et du racisme.
120x90cm
Huile sur toile, Pigments purs, Sables des plages du débarquement, Terre d’Auschwitz
120x90cm
Huile sur toile, Pigments purs, Sables des plages du débarquement, Terre d’Auschwitz
Hravka Folman Présentation
NĂ©e Ă Kielce (Pologne) en 1924.
Hravka Folman Raban est l’une des dernières combattantes vivantes du ghetto de Varsovie, ou elle a été agent de liaison durant les affrontements. Elle avait 15 ans.
Elle a été arrêtée à 18 ans par les Allemands puis envoyée à Auschwitz-Birkenau. Elle à fait la marche de la mort. Son numéro est le 32291.
Elle est arrivée en Israël en 1947, et compte parmi les fondateurs du kibboutz Beit lohemei haghetaot « la maison des combattants ».
Quand vous êtes vous sentie libre ?
 « J’avais deux frères plus âgés que moi, Wolf né en 1914 et Mordechaï né en 1916.
Après ma naissance à Kielce, ma famille est venue vivre à Varsovie. Mon père s’appelait Abraham Benyanim Folman et ma mère Rosalia Shochana. Ma mère avait comme caractéristique de ressembler à une aryenne, car elle était blonde et avait les yeux bleus.
Je me suis sentie libre quand je suis arrivĂ©e en Suède après mon sĂ©jour Ă RavensbrĂĽck, et j’ai surtout eu ce sentiment de libertĂ© quand, Ă Malmoe , bien qu’elles Ă©taient masquĂ©es pour se protĂ©ger d’éventuelles maladie ,deux femmes, des infirmières m’ont lavĂ©e sous une vraie douche avec du savon . J’ai senti sur ma peau le contact de leurs mains douces et attentionnĂ©es. J’ai senti alors un monde de tendresse.
Et la liberté de l’esprit ?
Cette libertĂ© je l’ai ressentie  tout le long de la guerre, car j’étais active dans clandestinitĂ© comme les Polonais qui l’Ă©taient dans la rĂ©sistance. Dans le ghetto j’Ă©tais agent de liaison. Je faisais passer les messages, je me sentais active et libre. Ma libertĂ© venait de mon combat.
Hravka Folman à Auschwitz-photo du musée des Combattants
Qu’avez-vous fait la première  année de votre libération ?
J’étais en Suède, mais on m’a demandé de revenir en Pologne, car la guerre avait été atroce et la Pologne était détruite, j’ai été rappelée par le chef de la résistance du ghetto pour aider les personnes démunies.
Il ne faut pas oublier que les Polonais fascistes tuaient les juifs, il fallait donc préparer notre  venue en Israël.
Quand êtes vous arrivée en Israël ?
En 1947.. Je me suis mariée en 1948 avec un soldat qui faisait partie de la brigade juive dans l’armée anglaise. Nous avons eu 3 enfants : 1 fils, 2 filles et 12 petits enfants.
Dans cette vie après la guerre avez-vous rencontré des difficultés ?
Je voulais des enfants tout de suite après le mariage et j’ai eu des problèmes pour les avoir.
Mais pour le reste j’ai eu les difficultés de tout le monde, classiques, rien d’essentiel.
Il fallait créer et mettre en place Israël, mais j’étais heureuse.
J’aime la vie, j’aime dessiner, la musique la culture l’art et surtout la jeunesse, c’est ma vocation.
Mon mĂ©tier a Ă©tĂ© d’être institutrice dans le Kibboutz et après j’ai Ă©tĂ© directrice d’un Ă©tablissement scolaire.
Depuis 25 ans je travaille au « Musée des combattant des ghettos »
Le musée des enfants de la déportation à Beit Lohemei Hagethaot près de Akko-( Saint jean d’Acre)
Quel est le mot, la phrase, la couleur, la musique, la personne qui vous a fait tenir durant toute votre vie ?
C’est la solidarité avec les gens, le mouvement idéologique dans lequel j’ai grandi. Tout est parti de là .
J’ai commencé dans le ghetto, j’avais 15 ans puis quand j’ai été arrêtée par les Allemands pour aller à Birkenau j’en avais 18.
Je suis restée deux ans à Birkenau, puis j’ai fait la marche de la mort.
Ensuite je suis allée à Ravensbruck.
C’est un accord entre les Allemands et la croix rouge qui m’a permis de faire partie d’un convoi de 4000 personnes qui sont allées en Suède.
Avez-vous un souvenir particulier du ghetto ou d’ailleurs ?
Oui : l’odeur à Birkenau. L’odeur de la fumée et de la peau brûlée.
Et vos parents ?
Mon père est mort à Treblinka.
Mon premier frère est mort en tant que partisan en Pologne.
Mon deuxième frère Ă©tait actif dans les autres ghettos. Il s’est fait arrĂŞter Ă la gare. Les Allemands dĂ©couvrent qu’il est juif .Il a Ă©tĂ©  assassinĂ© et il est mort Ă la gare..
Quant à ma mère qui était très blonde et avait l’allure d’une Polonaise, elle n’a pas été arrêtée, elle est même venue en Israël mais elle est morte jeune, à 59 ans.
Ile ne me reste plus de ma famille, qu’un neveu qui est en vie et qui est pĂ©diatre au Canada.
1NDLR. Le lendemain de notre entretien Havka rencontrait pendant 3 heures 300 jeunes Ă qui elle expliquait son parcours.
Comme considérez-vous votre vie aujourd’hui avec le recul ?
Je ne regrette rien de ce que j’ai fait. Tout ce que j’ai fait je l’ai fait en pleine conscience. Je n’oublie pas mon passé mais ce n’est pas mon obsession. Il m’a marquée, mais ce qui m’intéresse c’est ce qui se passe en Israël.
Alors comment considérez-vous aujourd’hui Israël et son évolution ?
Quand je suis venue en Israël j’avais un idéal.
J’ai été très heureuse de venir en Israël et de servir à son développement. En revanche je suis déçue parfois par ce qui s’y passe actuellement, surtout par la politique, cela me fait très mal.
Je suis concernée par les problèmes de société, de géopolitique, de comportement de la jeunesse..
Je voyais cela autrement. C’est pour cela que je suis très liée aux jeunes et que j’espère voir les changements positifs.
Mais je suis très fière d’Israël, que j’aime beaucoup et c’est pour cela que je m’y suis vouée.
Pensez-vous que les changements en Israël datent de la mort de Rabin ?
Cela a été important mais ce n’est pas l’explication, ce n’est qu’un signe.
Quel est le message que vous voulez transmettre aux jeunes ?
Mon message est de ne pas être indifférent, de garder un comportement normal.
Il ne faut pas entrer dans la provocation, il faut s’adapter.
J’ai connu la vraie violence, il faut opérer un changement dans la société.
Quand je parle aux jeunes, je leur parle de racisme et de violence.
J’ai l’espoir que les jeunes feront le changement de la société.
 PS dans le livre que Hravka Folman Rabann a écrit en anglais, édité par le musée, qui s’intitule « They are still with me », la dernière page dit la phrase suivante :
« Je dis ce qui m’est arrivé durant la guerre, parce qu’il est important que les  lecteurs retiennent un peu de mes souvenirs, mais la plus importante chose qu’ils doivent comprendre et que la haine pour l’enfant arabe est la même que la haine qui existait pour l’enfant juif ».
Commentaire sur le tableau
Longtemps il m’a fallu réfléchir à cet entretien avant d’entrer dans la réalisation de ce tableau. Comment exprimer cette force et cette détermination que Hravka,  femme de courage transmet dans son regard et à travers  ses phrases courtes et fermes. Pourtant c’est un message de Paix qu’elle donne.  Elle a vu le pire et vécu l’horreur des camps et aujourd’hui elle offre  l’exemple de la tolérance et du respect quand elle enseigne à l’ensemble  d’enfants  arabes et juifs.
Le tableau montre deux jeunes filles se faisant face. l’une est juive en bleu, l’autre est musulmane en vert. Leur sang  rouge coule par terre issu des griffes de l’aigle allemande personnifiant la barbarie. « Gott mit uns » (Dieu avec nous ) figurait sur le ceinturon des soldats de la Wechmacht.
Le choc de cette toile lorsqu’elle a été présentée pour la première fois en janvier 2014 a été tel qu’il me faut le relater. Alors que ce tableau était exposé  à l’UNESCO, une classe d’adolescents issus  d’un lycée voisin est venue visiter l’exposition. Parmi ces jeunes il y avait un jeune fille musulmane portant le voile. Après avoir longuement regardé le tableau elle se mit à pleurer…